Après 19 ans de prison, les charges sont abandonnées à l'encontre d'une femme accusée d'avoir mortellement secoué un bébé
par Zoe Strozewski
Newsweek
21 octobre 2021
Les charges ont été abandonnées à l'encontre d'une femme de l'Ohio qui a passé 19 ans en prison pour avoir prétendument tué un bébé qui lui avait été confié, après la découverte de nouvelles preuves scientifiques, selon l'Associated Press. Kim Hoover-Moore, 57 ans, a été reconnue coupable en 2003 du meurtre d'une fillette de 9 mois qui, selon un médecin légiste, a été victime du syndrome du bébé secoué.
Une réévaluation des preuves a montré que Samaisha Benson souffrait d'une blessure ancienne qui aurait pu provoquer l'hémorragie, selon une déclaration sous serment d'un médecin légiste du comté de Franklin plus tôt cette année. Benson semble avoir subi la blessure quelques jours avant que Hoover-Moore ne relève les symptômes chez l'enfant, selon une demande en révision du procès.
"Il m'est impossible de conclure, sur la base des éléments anatomopathologiques, que les lésions présentées par Samaisha datent du moment où l'enfant était gardé par Mme Hoover-Moore", a écrit le Dr Patrick Fardal dans la déclaration sous serment du 18 février. "Les lésions se sont toutes produites dans les 4 à 5 jours précédant sa mort".
Mme Hoover-Moore pourrait être libérée dès jeudi, selon l'AP.
Fardal s'est refusé à tout commentaire jeudi.
Le juge du comté de Franklin, Carl Aveni, a accédé à la demande de nouveau procès. Il a annulé la condamnation de Hoover-Moore et ordonné sa libération immédiate.
Le procureur du comté de Franklin, Gary Tyack, qui représentait précédemment Hoover-Moore, s'est récusé. Un autre procureur a rejeté toutes les accusations "dans l'intérêt de la justice". Le procureur et les avocats de la défense ont convenu dans une motion du tribunal que les preuves à l'époque étaient suffisantes pour poursuivre Hoover-Moore.
Un avocat de Mme Hoover-Moore a déclaré jeudi que justice avait été rendue après 19 ans.
"Les preuves médicales prouvent ce que Mme Hoover-Moore a toujours dit : Elle est innocente", a déclaré jeudi Joanna Sanchez, directrice du Ohio Public Defender's Wrongful Conviction Project.
Les avocats de Mme Hoover-Moore pensent que cette affaire pourrait être la première exonération en Ohio concernant une condamnation pour bébé secoué, selon les données compilées par le National Registry of Exonerations de l'Université du Michigan.
Au niveau national, les condamnations pour "bébé secoué" sont de plus en plus remises en question du fait de nouvelles preuves scientifiques, avec de multiples acquittements et exonérations. En avril, un homme de Californie a été libéré après 15 ans de prison, les procureurs et un juge ayant convenu que les recherches scientifiques à l'origine du syndrome du bébé secoué avaient considérablement évolué ces dernières années.
Le père du nourrisson a déposé la fillette au domicile de Hoover-Moore à Columbus le 29 novembre 2002, selon la requête de Hoover-Moore pour un nouveau procès déposée en juin par l'avocat Kort Gatterdam.
Après avoir constaté que le bébé ne tenait pas sa tête et ne respirait pas correctement, Hoover-Moore a appelé les secours. Le bébé a été emmené à l'hôpital pour enfants de Columbus où le diagnostic de "bébé secoué" a été posé sur la base d'un scanner montrant une fracture du crâne et une hémorragie intracranienne. La fillette est décédée le 1er décembre 2002.
Suite à une demande de nouveau procès en 2018, les avocats de Hoover-Moore ont pu accéder aux dossiers médicaux de la victime, aux images radiologiques et aux rapports d'autopsie, et une nouvelle analyse a trouvé des preuves d'une blessure datant de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois.
La requête de Hoover-Moore pour un nouveau procès incluait également des rapports de police faisant référence à des violences domestiques impliquant les parents du nourrisson, dont un cas dans lequel le père a frappé la mère alors qu'elle tenait un autre enfant, et dans lequel le père a secoué cet enfant pour la faire taire.
Le nouveau témoignage indique que "les preuves médicales ne désignent plus Mme Hoover-Moore comme la seule coupable possible, puisque n'importe quelle personne en charge de Samaisha dans les semaines ou les mois précédant sa mort pourrait être responsable de sa mort", selon le dépôt.
Un message téléphonique a été laissé sur le répondeur de la mère de Samaisha Benson.
Voici une longue interview (en anglais) de Kim Hoover-Moore réalisée juste après sa sortie de prison.
Voici également un reportage (en anglais) de quelques minutes datant de 2018.