Aux États-Unis, un centre de formation continue vient de publier un support de cours pour les infirmières intitulé : « savoir reconnaître le traumatisme crânien intentionnel (syndrome du bébé secoué) ». Dans ce document de dix pages, correspondant à un cours de deux heures, les différents aspects de ce diagnostic sont évoqués : historique, mécanismes lésionnels, lésions caractéristiques, procédure diagnostique, facteurs de risques, formation, prévention, procédures judiciaires.
Ce document contient également un paragraphe bienvenu sur les possibilités d'erreurs diagnostiques et sur la controverse médicoscientifique concernant le syndrome du bébé secoué. Le cours encourage les infirmières et les autres personnels de santé à ne pas conclure trop vite à la maltraitance et à considérer toutes les autres possibilités médicales devant un enfant présentant des lésions suspectes. Il serait temps que les formations similaires en France intègrent également ces notions dans le but de réduire le nombre d'erreurs diagnostiques. Nous proposons ici une traduction de ce paragraphe.
Un diagnostic controversé
RECOGNIZING PEDIATRIC ABUSIVE HEAD TRAUMA
(SHAKEN BABY SYNDROME)
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James Wittenauer, MSN, MPA, BSN, RN-BC
Cheryl Duksta, RN, ADN, M.Ed
Shelda L. Hudson, RN, BSN, PHN
Ces dernières années, le diagnostic du traumatisme crânien intentionnel / syndrome du bébé secoué a été remis en question, suscitant des débats parmi les experts médicaux et les juristes. Il y a eu de nombreux cas dans lesquels des parents ou nounous ont été condamnés, avant que l'on découvre par la suite que les antécédents médicaux et des pathologies neurologiques de l'enfant n'avaient pas été considérés. Il est important que les signes et symptômes associés à une pathologie sous-jacente ne soient pas négligés. Un diagnostic erroné peut conduire des innocents à être accusés à tort de maltraitance et à être incarcérés.
Vers la fin de sa vie, le neurochirurgien qui avait été le premier à décrire les lésions révélatrices du SBS, le Dr Norman Guthkelch, a exprimé son inquiétude quant à la fréquence des diagnostics de SBS. Il a consacré tout son temps à examiner les dossiers de personnes qui avaient pu être condamnées à tort.
Le Dr Guthkelch a examiné une affaire en Arizona dans laquelle un père a été condamné en 2002 pour SBS lors du décès de son bébé en 2000. En 2008, l'Arizona Justice Project a commencé à enquêter sur cette affaire.
Le Dr Guthkelch craignait que les antécédents médicaux de l'enfant aient été ignorés et que le diagnostic de SBS ait été posé à tort. Les parents avaient fait tout ce qui était en leur pouvoir pour rechercher des explications médicales et des soins pour leur fils qui avait des problèmes médicaux depuis sa naissance et des antécédents de crises épileptiques incontrôlées par la suite. Pourtant, les antécédents médicaux ont été ignorés et les médecins qui avaient vu l'enfant avant sa dernière visite aux urgences n'ont jamais été consultés avant sa condamnation.
Après examen des dossiers médicaux et des résultats de l'autopsie par cinq médecins, dont celui qui avait initialement déterminé la cause du décès, le consensus était que le nourrisson était mort d'une pathologie ayant conduit à une thrombose veineuse.
Les avocats pro bono ont déposé une requête pour un nouveau procès et ont demandé l'annulation de la condamnation pour meurtre. Au lieu d'un nouveau procès, après une décennie de prison, le père a été libéré, et le procureur du comté a rejeté toutes les accusations.
Les chercheurs et ceux qui enquêtent sur les cas de condamnations erronées continuent de contribuer aux connaissances médicales existantes sur le SBS. Les infirmières et les autres professionnels de la santé doivent veiller à ne pas conclure trop vite à la maltraitance en cas de suspicion de SBS. Les professionnels de santé ne doivent pas faire preuve d'un zèle excessif en concluant que chaque enfant qui présente certains symptômes est victime de maltraitance. Il peut être difficile de distinguer la maltraitance d'autres pathologies. Les diagnostics différentiels sont très importants. Des hématomes sous-duraux peuvent être présents dès la naissance. Certaines conditions médicales telles que la thrombose du sinus veineux imitent les symptômes du SBS.
Lorsque l'on soupçonne une maltraitance, il est très important de protéger l'enfant. Le rôle de l'infirmière est de défendre son patient - l'enfant - en évaluant avec précision le patient et en lui administrant des soins de manière professionnelle et objective. L'infirmière doit consulter les autres membres de l'équipe de soins pour déterminer les besoins appropriés de l'enfant et de la famille.