Le Pr Claude Hamonet, ancien expert agréé auprès de la Cour de Cassation, a publié avec trois confrères en mars 2019 un article dans la Gazette du Palais, la revue des avocats et du monde judiciaire. Cet article informe des fausses accusations de maltraitance que doivent subir beaucoup de parents dont les enfants sont atteints du syndrome d'Ehlers-Danlos.
Cette maladie héréditaire touche près de 2% de la population française. Elle est pourtant méconnue des médecins français. Cette maladie affectant le tissu conjonctif, elle touche l'ensemble du corps humain. Elle peut causer des hémorragies, des ecchymoses, et des fractures quasi-spontanées. Chez de jeunes enfants, ces lésions évoquent des actes de maltraitance. Les médecins ne pensent que rarement à effectuer les tests permettant de le diagnostiquer.
Les auteurs listent neuf symptômes très évocateurs du syndrome d'Ehlers-Danlos : selon eux, la présence de cinq symptômes parmi les neuf suivants permet d'établir le diagnostic avec une sensibilité proche de 100% :
- des douleurs articulaires et périarticulaires diffuses ;
- une fatigue importante ;
- des troubles du contrôle des mouvements volontaires, avec maladresses, heurts d’obstacles, déviation de la
marche, chutes ; - une instabilité articulaire avec pseudo entorses, blocages, subluxations (incluant les craquements
articulaires) ou luxations ; - une peau amincie, transparente, étirable, ne protégeant pas contre l’électrostatisme ;
- une hypermobilité articulaire dont l’absence n’exclut pas le diagnostic ;
- des reflux gastro-œsophagiens ;
- des ecchymoses, pour des traumatismes minimes ;
- une hyperacousie.
Les auteurs dénoncent alors les fausses accusations de maltraitance posées à cause d'une erreur diagnostique :
Les conséquences affectives et sociales pour les parents, injustement accusés, alors que l’un d’entre eux au moins est atteint par la même maladie sont considérables. Les conséquences pour l’enfant, séparé de sa famille sont également graves, pour sa santé car il risque des complications qui peuvent mettre en jeu sa vie en étant confié à une famille d’accueil ignorante de ses fragilités.
Les raisons de cette confusion sont la découverte d’ecchymoses ou autres saignements, de plaies, de fractures, le plus souvent sans déplacement, qui peuvent siéger aux extrémités osseuses mais aussi aux côtes, au crâne…, de luxations. Le signalement à la justice est fréquemment fait par les urgences pédiatriques, souvent sans informer et questionner les parents.
Le syndrome du « bébé secoué » a fait l’objet d’un communiqué commun de la Haute autorité de santé (HAS) et de la Société française de médecine physique et de réadaptation (SOFMER) en 2017. Il est responsable de lésions hémorragiques cérébrales observées aussi dans la maladie d’Ehlers-Danlos.
En conclusion :
Il importe que le médecin qui suspecte un syndrome de Silverman ou du « bébé secoué » se soit bien assuré d’éliminer une autre cause. La grande fréquence de la maladie d’Ehlers-Danlos impose qu’elle soit évoquée systématiquement. D’autres maladies peuvent être incriminées telle que la « maladie des os de verre ». Le caractère familial mis en évidence par la découverte des signes chez l’un les deux parents constitue un argument très fort. Avant d’envisager des violences parentales, le médecin et le juge doivent, devant un enfant présentant des lésions évoquant cette hypothèse, systématiquement discuter la présence d’une maladie héréditaire très fréquente mais très mal connue : Ehlers-Danlos.
Sources :