Traduction d'un communiqué de presse de la faculté de droit de l’Université de Santa Clara, Californie, 24 août 2018.
Le bureau du procureur accepte les preuves médicales et abandonne les charges de meurtre et de maltraitance contre un couple de Chico, qui n'ira donc pas au procès pour la mort de leur jeune fils.
Une nouvelle affaire où des preuves médicales ont conduit à l'exonération d'innocents accusés à tort vient de se terminer. Un couple de Chico, Peter et Edelyn Yhip, ont vu leur dossier abandonné par le bureau du procureur du comté de Butte, à cause de preuves insuffisantes.
Le dossier concerne des accusations du syndrome du bébé secoué et du traumatisme crânien intentionnel. Ces diagnostics médicaux ont conduit des milliers de parents à perdre la garde de leurs enfants, et pour certains d'entre eux, à être condamnés à de la prison à vie. Dans le cas des Yhip, qui ont été poursuivis en 2012 après la mort de leur jeune fils, la première revue systématique du diagnostic du syndrome du bébé secoué effectuée par une agence gouvernementale indépendante a établi que les preuves de ce diagnostic étaient insuffisantes.
« Ce dossier est l'un des nombreux dossiers tragiques dans tout le pays où des preuves médicales invalides ont conduit à des poursuites criminelles contre des parents après la mort d'un enfant », dit la directrice du Projet Innocence de Californie du Nord (NCIP), Linda Starr. « Avec l'abandon de ce dossier, les Yhips rejoignent le groupe croissant de ceux pour lesquels les tribunaux et les procureurs ont reconnu l'invalidité de preuves médicales, annulé des condamnations, ou abandonné les poursuites. »
En 2012, le couple de Chico a été poursuivi pour des maltraitances ayant conduit à la mort de leur jeune fils. Après leur libération conditionnelle, le couple s'est battu pour récupérer la garde de leurs deux enfants, et ils ont travaillé avec les avocats de la défense Aaron Meyer (Peter Yhip), Victor Haltom (Edelyn Yhip), l'avocat pro bono Heather Kirkwood, et l'avocat du NCIP Paige Kaneb pour prouver leur innocence.
En 2010, les Yhips ont adopté deux jumeaux âgés d'un an, Ben et Jon, de Taïwan. Ben avait alors eu des problèmes de santé chroniques qui incluaient des infections récurrentes et au moins six hospitalisations de plusieurs jours au cours de sa première année de vie. Lorsque les problèmes de santé de Ben ont continué aux États-Unis, les Yhips ont consulté à de multiples reprises pour Ben. En novembre 2011, Ben a été hospitalisé et on lui a diagnostiqué un retard de croissance, et il a dû être nourri par un tube gastrique. À ce moment-là, les radiographies démontraient plusieurs anomalies osseuses.
En avril 2012, alors que Ben avait pratiquement 3 ans, il a cessé de respirer chez lui. Madame Yhip a appelé les secours, les ambulanciers sont arrivés, et ils ont intubé Ben, qui était alors inconscient. À l'hôpital, les radiographies montraient les mêmes anomalies des os, suggérant une maladie génétique, et le neurochirurgien a conclu que Ben avait eu une attaque cérébrale causant son malaise. Ben a été placé sous respirateur artificiel avant d'être déclaré en mort cérébral. Ses organes ont été donnés.
Malgré toutes les preuves que Ben était un enfant malade qui était mort de manière tragique, et l'absence de fracture du crâne, d’œdème des tissus mous, ou de bleus majeurs, l’autopsie a conclu que la cause de la mort était un « traumatisme crânien sévère » basé sur la découverte de lésions intracrâniennes couramment attribuées au diagnostic médical peu fiable de « syndrome du bébé secoué » et de « traumatisme crânien intentionnel ». Le rapport a aussi suggéré que les anomalies des os étaient des fractures, indiquant une maltraitance.
A cause de cela, le Yhip ont été poursuivi pour meurtre et arrêtés. Ils ont été placé en libération conditionnelle. Leurs deux autres enfants leur ont été retirés.
En 2012 et 2013, un tribunal a tenu une audience pour déterminer si les Yhips pouvaient récupérer leurs autres enfants. Les experts de la défense ont rapporté que les anomalies osseuses étaient compatibles avec une maladie, et que Ben avait eu une infection qui avait causé une attaque cérébrale et un malaise. Au final, le tribunal a décidé qu'il y avait suffisamment de preuves démontrant que Ben était mort d'une maladie, que les Yhips avaient toujours consulté de manière appropriée, et qu'il n'y avait aucune preuve d'actes criminels. Les enfants des Yhips sont alors retournés chez leurs parents.
Entre 2013 et 2016, des appels ont été faits à la Cour Supérieur, à la Cour d'Appel, et à la Cour Suprême de Californie, argumentant que la procédure criminelle devait être abandonnée au vu de la décision de la cour familiale et la reconnaissance que Ben était mort naturellement. Tous les appels ont été rejetés et le procès a été programmé.
En 2017, le procureur a consulté un autre expert médical qui a rendu son rapport en janvier 2018, et dans lequel elle a constaté des preuves d'une infection à travers le système nerveux de Ben, et des thromboses à de multiples endroits du corps, suggérant des causes médicales ayant pu causer sa mort.
En jiullet 2018, l'équipe de la défense a réuni de nouveaux rapports médicaux sur la question des infections et des traumatismes, des articles montrant qu'une attaque cérébrale peut conduire à des signes traditionnellement attribués au diagnostic du syndrome du bébé secoué, et des détails sur une maladie métabolique osseuse.
L'avocate du NCIP Paige Kaneb a dit :
« C'était vraiment gratifiant de rencontrer le procureur et de l'entendre dire qu'il se posait des questions, et qu'il réunissait des preuves en ce sens. C'était particulièrement encourageant de savoir que le procureur était intéressé par les preuves et qu'il voulait trouver la vérité sur ce qui était arrivé à Ben. »
Après avoir consulté ces informations supplémentaires, le procureur a décidé d'abandonner toutes les charges.
Désormais, la famille peut faire le deuil de l'enfant et du frère qu'ils ont perdu il y a six ans.
« Nous ne pensions jamais être dans cette situation », dit Madame Yhip. « Il y a d'autres personnes comme nous, se battant pour laver leur nom, sans savoir ce qui va leur arriver ou arriver à leurs enfants. Nous avons été bénis par tant de personnes souhaitant aider, des avocats, amis, des personnes que nous ne connaissons même pas. Nous avons hâte de tourner la page de cette tragédie. »
A propos du Projet Innocence de Californie du Nord
Le NCIP est un programme à but non lucratif de la faculté de droit de l'Université de Santa Clara, dont la mission est de promouvoir un système de justice criminelle équilibré, efficace, et humain, et de protéger les droits des innocents. Depuis sa création en 2001, le NCIP a traité plus de 10 000 demandes pour l'assistance de détenus, a enquêté sur des centaines de dossiers, a traité des litiges et des résolutions dans des douzaines de cas, et obtenu la libération de 23 personnes innocentes emprisonnées à tort.
Sources :