En Californie, une grand-mère de 64 ans, Maria Mendez, vient d’être libérée après avoir passé 11 ans en prison pour un crime qu’elle n’avait pas commis.
En 2006, elle gardait son petit-fils de neuf mois, Emmanuel, lorsque ce dernier a fait un malaise soudain et un arrêt cardiaque. Il a été réanimé à l’hôpital, mais il est décédé une semaine plus tard. Deux jours plus tôt, ses parents avaient dit qu’il avait chuté du lit en se cognant la tête sur un sol dur.
Des médecins avaient alors diagnostiqué un traumatisme crânien intentionnel. Ils n’étaient pas en mesure d’indiquer précisément quels gestes avaient eu lieu, s’il s’agissait de secouements, de coups, ou d’un étouffement, mais ils étaient totalement sûrs qu’il s’agissait dans tous les cas d’un meurtre.
Mendez avait donc été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle pendant 25 ans, alors même qu'elle a toujours clamé son innocence.
Un Projet Innocence (de la Faculté de Droit Loyola) s’est penché sur le dossier pendant plusieurs années, et le groupe d'avocats et d'étudiants a pu mettre en évidence des éléments remettant en question la condamnation.
Au procès, l’expert médical avait dit que le scanner montrait un œdème cérébral massif, l’un des signes servant au diagnostic du traumatisme crânien intentionnel. À l’époque, l’avocat de Mendez n’avait pas pu obtenir les images scanner cérébral. Le Projet Innocence a pu se le procurer et constater qu’il n’y avait en fait aucun œdème cérébral. L’expert a finalement admis avoir fait un faux témoignage lors du procès. Le scanner montrait aussi une petite fracture du crâne compatible avec le récit de chute.
Un autre expert avait dit qu’il n’y avait pas de photos de l’autopsie, alors qu’il y en avait en réalité. Ces photos montraient bien les traces de la chute et elles auraient pu mettre Mendez hors de cause.
En juin 2018, plusieurs experts de tout le pays ont témoigné de manière bénévole pour Mendez, et ils ont été entendus pendant une semaine par le tribunal. Ils ont détaillé toutes les preuves montrant que la mort était accidentelle et non intentionnelle. Pour l’un d’eux, « un impact, qu’il soit intentionnel ou non, a toujours le même effet sur le cerveau d’un bébé. Un cerveau n’a pas de détecteur de maltraitance ! »
Le médecin légiste en chef de l’époque a aussi dit qu’il avait été le seul expert a témoigner en faveur de Mendez à son procès : « ma conviction inébranlable est que Maria Mendez a été condamnée à tort. Ce cas m’a hanté pendant des années. »
Pour un responsable du projet Innocence : « il n’y avait aucune preuve médicale soutenant la conclusion du médecin légiste qu’il s’agissait d’un homicide. Il n’y a eu aucun crime. Maria Mendez n’aurait jamais due être poursuivie pour crime. Elle a été incapable de se défendre au procès notamment parce que les médecins légistes ont occulté les éléments de preuve les plus importants du dossier : les photos d’autopsie montrant que les blessures de l’enfant étaient compatibles avec une chute accidentelle deux jours plus tôt. »
Maria Mendez a accepté un plaidoyer de non contestation pour être enfin libre après 11 ans de prison : « Je peux sentir l’air frais dehors, je peux voir les oiseaux, je peux voir le soleil quand il se lève, je me sens si heureuse d’être dehors. Je ne veux plus penser à tous ces jours tristes, cela me fait du mal. »
Mais elle a tout perdu, sa maison et tout le reste. Pour le directeur du projet Innocence : « cette famille a connu tragédie après tragédie, d’abord avec la mort accidentelle de ce bébé, et ensuite avec la condamnation à tort de leur mère et grand-mère chérie, Maria. Peut-être que désormais la famille peut commencer à se reconstruire. »
Ses proches ont mis en place une cagnotte pour l’aider : « Maria Mendez est, et elle a toujours été, une mère et une grand-mère aimante. Elle a élevé 10 enfants toute seule et elle a aidé ses enfants à élever de nombreux petits enfants. Maria veut retourner auprès de sa famille à Mexico et passer le reste de sa vie libre entourée des proches qu’elle aime. »
Pour l’avocat de Mendez, cité par un journaliste de NBC : « Cette affaire n’est que la face émergée d’un énorme iceberg. Des gens sont condamnés dans tout le pays sur des cas de bébés secoués, alors même que le diagnostic médical lui-même est controversé. »
Sources :