Il y a exactement dix ans, Sally Clark, une juriste britannique, se suicidait.
Le 13 décembre 1996, son fils Christopher âgé de trois mois décède subitement.
Deux ans plus tard, son autre fils Harry âgé de deux mois décède lui aussi.
La perte de deux bébés est une épreuve indicible pour n'importe quelle mère. Mais ce ne fut pour Sally Clark que le début du cauchemar.
Devant la mort inexpliquée de deux enfants, les pédiatres ont accusé Sally Clark de meurtre. Leur argument ? La mort subite du nourrisson est un événement rare (statistiquement, une chance sur 8543). Dans ces conditions, la survenue de deux épisodes de mort subite du nourrisson dans la même famille est encore plus rare, environ une chance sur 73 millions d'après leurs calculs (1/8543 au carré). Cette probabilité serait si faible que la seule explication serait que Sally Clark aurait assassiné ses enfants.
Sally Clark a ainsi été emprisonnée entre 1999 et 2003.
Finalement, après avoir fait appel plusieurs fois, elle a été libérée lorsque des statisticiens de la Royal Statistical Society ont démontré que l'argument mathématique était totalement faux, et lorsqu'il est apparu que les médecins avaient caché à l'autopsie le fait que Harry montrait des signes d'infection généralisée pouvant expliquer sa mort.
Le pédiatre qui avait élaboré la "théorie" que deux morts subites du nourrisson dans une même famille ne peuvent s'expliquer que par un meurtre a été radié de l'Ordre des médecins, mais il a été réintégré peu après.
Après cette terrible épreuve, Sally Clark a souffert de nombreux troubles psychiatriques, notamment une dépression sévère, et elle a fini par mourir de chagrin en 2007.
Cette affaire tragique a mis au jour la faiblesse des arguments de certains médecins légistes dans les affaires de soupçons de maltraitance infantile. Les accusations sont en fait basées sur les diplômes de ces médecins (argument d'autorité) et non sur des preuves tangibles. Les juges et les jurés, impressionnés devant ces théories prétendument infaillibles, n'hésitent pas à condamner de nombreuses personnes même lorsque les avis des médecins ne constituent que le seul élément à charge.
L'histoire de Sally Clark n'est pas isolée. Elle ne pourrait être qu'un symptôme d'un système qui perdure encore aujourd'hui.